François Hollande a affirmé que Madame Le Pen parle comme « un tract communiste des années 70». Mon texte n'est ni une accusation, ni une affirmation gratuite contre le Président de la République. J'ai trop de respect et de considération pour la fonction présidentielle, même si de temps en temps il m'arrive d'affirmer comme d'autres que notre République est paradoxalement monarchique. C'est un autre débat à avoir. Cela étant dit, je vais essayer de démontrer comment François Hollande, candidat possible de la gauche en 2017, aide politiquement Marine Le Pen à barrer la route soit à Juppé, soit à Sarkozy, soit à un autre candidat à droite.

 

En affirmant que Marine Le Pen parle comme un tract communiste, il fait émerger explicitement Le Front national comme un parti politique digne d'intérêt, comme l'avait été le parti communiste pendant la résistance, mais surtout au cours des années 70 quand François Mitterrand a construit sa stratégie pour l'Élysée en élaborant le programme commun avec Georges Marchais. Assez paradoxalement, Marine Le Pen est sur la même ligne que Mélenchon du Front de Gauche dès lors qu'il s'agit de défendre l'État volontariste, la retraite à 60 ans et les Français d'abord; des thèmes que la Gauche est en train, progressivement et paradoxalement, d'abandonner.

De façon étrange Hollande ne s'est jamais pris frontalement à Mélenchon. Or, on peut noter que les parallélismes des formes du discours politique de Marine Le Pen rejoignent ceux de Mélenchon et vice-versa même s'il y a une divergence sur l'Europe entre les deux leaders politiques. En déclarant que l'on pouvait assimiler le discours de Marine Le Pen au discours communiste des années 70, Hollande valide la tripartition du paysage politique français au sein duquel le Front national aurait remplacé le Parti communiste.

Hollande, comme Mitterrand dans les années 80, ira-t-il jusqu'à demander une représentation de cette partie de la France qui vote à l'extrême droite au cours des élections législatives grâce à une dose de proportionnelle ? Rien n'est moins sûr, mais on peut être amené à le penser. On note que le Front national a le vent en poupe. Ce succès est le résultat de sa propre implantation dans le paysage politique français mais participe aussi de la droitisation de la société française sur les plans sociologiques et politiques.

Les questions portant sur l'identité, l'Islam, l'immigration deviennent aujourd'hui présentes dans le débat public. Le Front national qui le premier avait porté de façon officielle ces questions, ce qui lui avait valu une ostracisation, une mise à l'écart politique, récolte aujourd'hui les fruits de son obstination. Hollande l'a compris et, en animal politique, il essaie de concentrer ses accusations sur le Front national dont les thèmes seraient pillés par la Droite classique pour mieux mobiliser les électeurs de gauche qui votent de moins en moins et qui se sentent trahis par leurs dirigeants dont Hollande serait le premier d'entre eux.
 

Hollande a une politique lisible au plan extérieur (Afrique, Syrie, Irak, Iran) mais il apparaît moins crédible au plan national même s'il reste un redoutable manœuvrier. L'arrivée du Front National dans le jeu politique français brouille les cartes en accentuant la confusion politique.

Marine Le Pen peut dire merci à Hollande en vue de la Présidentielle.